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20 mars 2020

Éli, Samuel et la communication intergénérationnelle

Dans son exhortation apostolique post-synodale Christus vivit, le pape François commence par recueillir « certains trésors des Saintes Écritures, où, à plusieurs reprises, on parle des jeunes et de la façon dont le Seigneur va à leur rencontre » (n° 5). Après avoir parlé de Joseph et de Gédéon, François écrit : « Samuel était un jeune peu sûr de lui-même, mais le Seigneur parlait avec lui. Sur le conseil d’un adulte, il a ouvert son cœur pour écouter l’appel de Dieu […]. C’est pourquoi il a été un grand prophète qui est intervenu en des moments importants pour sa patrie » (n° 8). Une relecture du récit de la vocation de Samuel risque de nous proposer des pistes de dialogue entre les générations.

La naissance de Samuel

Après avoir présenté la future famille de Samuel, le premier livre de Samuel souligne la stérilité d’Anne, qui deviendra sa mère. Celle-ci pria, rencontra le prêtre Éli, puis retourna chez elle où elle conçut et enfanta Samuel. Après l’avoir sevré, elle remonta à Silo où elle laissa l’enfant : « je le donne au Seigneur pour qu’il en dispose. Il demeurera à la disposition du Seigneur tous les jours de sa vie » (1 S 1, 28). Or ces événements arrivent dans un contexte bien particulier. « La parole du Seigneur était rare en ces jours-là, et la vision, peu répandue » (1 S 3, 1). Cela nous fait penser à notre époque. Mais Dieu n’a pas dit son dernier mot. « La lampe de Dieu n’était pas encore éteinte » (1 S 3, 3).

Au milieu de la nuit, Dieu appelle

« Samuel était couché dans le temple du Seigneur, où se trouvait l’arche de Dieu. Le Seigneur appela Samuel, qui répondit : « Me voici ! » (1 S 3, 3-4). De toute éternité, Dieu est présent à notre monde et à son Église. Sa lampe n’est pas éteinte. Elle brille dans notre obscurité. Le Seigneur continue de demeurer au milieu de nous (voir Ex 25, 8). Et comme il l’a fait avec le jeune Samuel, il continue d’appeler les jeunes d’aujourd’hui par leur nom. Aujourd’hui encore, Dieu n’a pas dit son dernier mot.

Une réponse généreuse qui a besoin d’être guidée

« Samuel ne connaissait pas encore le Seigneur, et la parole du Seigneur ne lui avait pas encore été révélée. » (1 S 3, 7). Pourtant il répond généreusement : « Me voici ! ». « Il courut vers le prêtre Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je n’ai pas appelé. Retourne te coucher. » L’enfant alla se coucher » (1 S 3, 5). Cela se produisit trois fois. Ce n’est qu’après la troisième visite de Samuel qu’« Éli comprit que c’était le Seigneur qui appelait l’enfant, et il lui dit : « Va te recoucher, et s’il t’appelle, tu diras : ‘Parle, Seigneur, ton serviteur écoute’ » (1 S 3, 8b-9).

Nos jeunes d’aujourd’hui : des gens généreux qui ont besoin d’être guidés

Encore aujourd’hui, c’est ma conviction profonde, Dieu continue d’appeler. Encore aujourd’hui, celles et ceux qui sont appelés sont des gens généreux, prêts à répondre « Me voici ! ». Mais il est fort possible que, comme le jeune Samuel, ils ne connaissent pas encore le Seigneur. Et ce n’est pas leur faute. Dans une société qui rejette de plus en plus le phénomène religieux, comment reconnaître « la parole du Seigneur » ? Nos jeunes répondent pourtant : « Me voici ! ». Pensons à leur engagement envers l’écologie, envers la paix, envers un monde plus juste ! Autant de signe que l’appel de Dieu trouvera chez eux un terreau fertile. Pourvu qu’un Éli puisse leur enseigner à dire « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute ».

Écouter Dieu en écoutant les jeunes

Dans Christus vivit, François rappelle que l’Église « est jeune quand elle est capable de retourner inlassablement à sa source » (n° 35). Or, « ce sont précisément les jeunes qui peuvent l’aider à rester jeune » (n° 37). « Ceux d’entre nous qui ne sont plus jeunes ont besoin d’occasions pour rester proches de leur voix et de leur enthousiasme, et « la proximité crée les conditions pour faire de l’Église un espace de dialogue et un fascinant témoignage de fraternité » (n° 38). « Quand l’Église […] s’ouvre à l’écoute disponible et attentive des jeunes, […] elle permet aux jeunes d’apporter quelque chose à la communauté » (n° 65). Et si nous prenions le risque d’être à nouveau près des jeunes pour les écouter et pour écouter avec eux !

Apprendre d’Éli et de Samuel

La vocation du jeune Samuel nous invite à dépasser nos préjugés et à accompagner les jeunes pour qu’ils entendent le Seigneur qui leur parle. « La clairvoyance de ceux qui ont été appelés à être père, pasteur ou guide des jeunes consiste à trouver la petite flamme qui continue de brûler » (n° 67). En marchant avec les jeunes (n° 206), nous découvrirons avec eux la lumière de Dieu qui est toujours allumée. Avec eux, avec nos communautés et avec toute l’Église, nous marcherons à sa lumière.

Questions

  • Sommes-nous ouverts à l’action de Dieu, même chez celles et ceux qui nous semblent éloignés de lui ?
  • Sommes-nous convaincus qu’au cœur de l’Église de notre temps, la lampe de Dieu n’est pas encore éteinte ? Quels en sont les signes ?
  • Sommes-nous attentifs à détecter les signes que Dieu fait aux jeunes qui nous côtoient ?
  • Comment pouvons-nous écouter avec eux ?
  • Comment pouvons-nous les aider à répondre généreusement : « Me voici ! Parle, Seigneur, ton serviteur écoute » ?
  • De quelle manière ma communauté marche-t-elle avec les jeunes ?

Yvan Mathieu, SM

Ce texte est extrait du webzine ad vitam de l’hiver 2020 « Une communion qui engendre la mission ».